Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 5-6.djvu/110

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air et un maintien aussi hébétés que possible, attendant la lettre de Robert de Mareuil, pendant que le poète, allant et venant dans sa chambre, continuait de mûrir son idée ; enfin elle fut à terme, car, s’arrêtant soudain, il me dit :

— Martin… tu es un honnête et fidèle garçon…

— Monsieur… vous êtes bien bon…

— Je veux t’assurer une position honorable…

— À moi, Monsieur ?

Je crus ingénument qu’il allait être de nouveau question des vingt-cinq louis de pour-boire qui devaient me rendre un jour vingt-trois fois plus riche que Jacques Laffitte ; mais point. Balthazar Rocher oubliait souvent, avec une modestie incroyable, les millions dont le douait sa féconde imagination et ceux qu’il prodiguait aux autres.

— Oui, Martin, — reprit-il, — je veux t’assurer une position honorable.

— Vous êtes bien bon, Monsieur.

— Dis-moi un peu… depuis que tu fais des commissions pour moi… je ne t’ai jamais payé… ce me semble ?

— Non, Monsieur,… mais…

— Ne parlons plus de cette misère, tout se retrouvera… tout-à-l’heure… Maintenant, écoute-moi : M. le comte Robert de Mareuil, mon ami, va désormais habiter avec moi ; au lieu de t’avoir en manière de domestique de raccroc, nous préférons posséder un serviteur fidèle et dévoué ; veux-tu entrer chez nous comme notre serviteur ?

— Monsieur…