Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 5-6.djvu/197

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Cet entretien à bâtons rompus, que je venais d’entendre, les faits qu’il me révélait, me frappèrent tellement, pour plusieurs motifs, qu’il m’est resté presque tout entier à la mémoire.

— Tiens ! te voilà au Musée, — avait dit un laquais aristocratique à un autre de ses camarades, — hier, aux Italiens… tu m’avais dit que vous alliez à la course du bois de Boulogne ?

— Oui, mais l’ordre de la marche a changé : nous avons été, après les Italiens, à l’ambassade de Sardaigne, et là on a changé d’avis, et on s’est donné rendez-vous pour ici, c’est sûr.

Il y était donc hier soir, à l’ambassade ?

— Parbleu… puisque nous y allions… il y était. Mais il a filé presque aussitôt que nous sommes arrivés… Je crois que nous commençons à joliment l’embêter… le fait est que Madame se fane diablement…

— Je l’ai vue avant-hier chez la duchesse de Beaupreau… ta maîtresse est une femme finie, mon cher.

— Que veux-tu ?… les blondes… et puis le chagrin, car elle a l’air d’y tenir à mort… et lui, plus du tout… Autrefois il arrivait partout avant elle, et s’en allait en même temps, lui donnait son manteau, faisait appeler ses gens quand elle venait seule… Mais à présent… ah ! bien oui, il arrive le dernier, et il s’en va le premier… Et puis, c’étaient des visites de deux et trois heures dans la matinée… Voilà cinq jours qu’il n’a pas mis les pieds à l’hôtel.

— Ta maîtresse est enfoncée… mon cher.

— Ça me fait cet effet-là… Tiens, aujourd’hui encore… elle croyait le trouver ici… je ne vois nulle