Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 5-6.djvu/246

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vous convenu… si tu n’y venais pas, plus de doute, tu étais pris ; nous voulions alors le lendemain parcourir le village, soit en mendiant, soit en chantant, et, une fois instruits de ton sort, nous aurions agi en conséquence.

— Mais le diable en a voulu autrement, — reprit Bamboche.

— Oui, — lui dis-je, — le diable ou le cul-de-jatte ?

— Comment sais-tu cela ? — s’écrièrent à la fois Basquine et Bamboche.

— Continuez… continuez, mes amis.

— Eh bien ! tu ne te trompes pas, — reprit Bamboche, — le cul-de-jatte en a décidé autrement ; car comme dit Basquine, il y a de singulières fatalités… Donc, une fois la nuit venue, nous avions été t’attendre à notre rendez-vous, il faisait un clair de lune superbe. Assis au pied de la croix de pierre, je m’amusais à compter notre argent dans le châle de Basquine… La route était déserte ; nous nous croyions seuls ; mais voilà qu’une main de fer m’empoigne brusquement par la nuque : — Sauve-toi, Basquine !

— Ça a été son premier cri, — dit la jeune fille.

— Mon second cri a été quelque chose comme : tonnerre de Dieu ! Et me voilà à me débattre de toutes mes forces, afin de me dégager et de prendre un de mes pistolets… J’y parviens, mais le gredin de cul-de-jatte…

— Je ne me trompais pas, — dis-je à Bamboche. — Il s’était sans doute tenu caché derrière la base de la croix de pierre.

— Juste, — poursuivit Bamboche. — Dans la lutte, le brigand m’arrache mon pistolet au moment où je venais de l’armer, et me le tire dans les côtes, ici, à droite,