Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 5-6.djvu/264

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— On attendait l’arrivée de plusieurs caisses d’habillements composant un magnifique trousseau, commandé pour moi à Paris, chez les meilleures faiseuses… Avant de poursuivre, je dois te dire, Martin, que miss Turner était une personne de manières accomplies, et qu’elle m’avait sans cesse repris avec douceur et fermeté sur tous les manques d’usage et sur les grossières expressions qui m’étaient familières. Je m’étudiais, pour lui complaire, à observer ses recommandations. La veille du jour où je fus présentée au duc de Castleby, miss Turner me dit : — « Vous voilà presque une petite lady accomplie, pour les manières et pour le savoir-vivre ; j’espère que Monseigneur sera très-content de ce que vous avez si bien profité de mes leçons. » Le jour de la présentation arriva. Si j’entre dans quelques détails sur ma toilette, mon bon Martin, c’est non par coquetterie, mais parce qu’elle avait, d’après les ordres du duc, un caractère enfantin très-prononcé : mes cheveux séparés au milieu de mon front tombaient en grosses boucles sur mon cou et sur mes épaules, j’avais les bras nus et une robe de magnifique mousseline des Indes brodée, avec un pantalon pareil, des bas de soie blancs à jours et de petits souliers de satin noir ; à force de m’entendre répéter par miss Turner et sa femme de chambre que j’étais charmante ainsi, je finis par me regarder dans une psyché, placée dans mon cabinet de toilette (il va sans dire que mon appartement était des plus complets depuis l’antichambre jusqu’à la salle de bain) ; après m’être ainsi contemplée, j’avoue en toute humilité que je me trouvai très-belle. — Maintenant, — me dit miss Turner de son air grave et compassé en