Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 5-6.djvu/300

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Je racontai aussi brièvement que possible tout ce qui m’était arrivé depuis notre séparation… et, je l’avoue, emporté par l’effusion, me faisant scrupule de cacher quelque chose à ceux-là qui, dans leur confiance expansive, venaient de m’initier aux plus secrètes pensées de leur cœur, aux plus tristes mystères de leur vie… je ne leur cachai ni mon respectueux amour pour Régina, ni les alarmes que me causaient les diverses poursuites dont elle était l’objet.

Et d’ailleurs, en outre de l’aveugle et légitime confiance que m’inspirait l’affection de Basquine et de Bamboche, je comptais sur la connaissance que ce dernier semblait avoir des antécédents de Robert de Mareuil, pour attendre au besoin un utile concours de mon ami d’enfance.

Je fus enfin amené à cette confidence, peut-être indiscrète, et par l’émotion sincère, profonde, que témoignèrent Basquine et Bamboche en m’entendant raconter ma lutte obstinée contre le mauvais sort, et par leur angoisse, je dirais même leur effroi… lorsque, dans mon récit, ils me virent sur le point de faillir.

Ah ! je respire… — s’écria Basquine. — Martin… un moment tu m’as fait peur… — dit Bamboche, lorsque je leur eus raconté comment la rencontre providentielle de Régina m’avait sauvé de l’infamie…

Contraste bizarre, encore pour moi inexplicable à cette heure, ces deux êtres n’espéraient plus rien, n’attendaient plus rien des sentiments honnêtes, élevés, généreux, et ils comprirent et ils apprécièrent avec la plus touchante sympathie tout ce qu’il pouvait y avoir de courageux et de bien dans ma conduite, durant ces