Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 5-6.djvu/349

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

teur, venez à mon secours… je n’espère qu’en vous..... Je sais que ça peut être mortel ; mais vous êtes un dieu sauveur, vous… oui, un dieu ! »

J’examine, et je lui dis : — Si l’opération n’est pas faite et dextrement faite, avant un quart-d’heure vous êtes mort.

— Mon admirable docteur, je vous devrai la vie.

— C’est possible ; mais d’abord, qui est-ce qui paie ici ?

— « Moi, docteur… et royalement, vous le savez bien ; mais ne parlons pas de cela… Vite… vite. »

— Parlons de cela au contraire. Je vous connais de reste ; je serais deux ou trois ans avant de vous arracher un sou, et encore il me faudra plaider avec vous. Donc, donnez-moi vingt mille francs à l’instant, ou… bonsoir.

À ces paroles impitoyables, je ne pus retenir un mouvement d’horreur. Le docteur ne parut pas s’en apercevoir, et continua :

— « Jésus, mon Dieu, — reprit le marquis, — vingt mille francs comme ça, tout de suite… tout d’un coup… tout d’une fois. Mais c’est un guet-apens affreux… et puis l’heure passe. Mon Dieu ! mon Dieu ! cher docteur, l’heure passe. »

— Je le crois bien, qu’elle passe… Voilà déjà deux minutes, — lui dis-je.

— « Mais puisque l’heure passe, — s’écria le marquis d’une voix déchirante… — opérez-moi, docteur. »

— Mais puisque l’heure passe… payez-moi, marquis. — La peur de mourir l’a enfin emporté sur l’avarice ; il a donné la clé de son coffre à un sien parent, et