Page:Sue - Martin l'enfant trouvé, vol. 7-8.djvu/211

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

peut-être permis de vous faire cet aveu… à cette heure que nous sommes sur le point de nous séparer ; aussi, à quoi bon vous rappeler mes vaines et tardives tentatives pour reconquérir votre amour… celui que vous aimiez, et il est digne de cet amour, Madame… »

— Il n’est que trop vrai… — murmura le prince avec un accablement douloureux, — ah ! elle ne l’eût pas aimé… sans cela !

— Ne vous désespérez pas d’un pareil choix, Monsieur, — dis-je au prince, — un sentiment élevé sauvegarde une âme généreuse… et d’elle on peut tout attendre… même un sacrifice héroïque.

— Quoi ! — s’écria le prince… — vous espérez…

— L’on doit tout espérer, Monsieur, d’un aussi noble cœur que celui de Mme de Montbar ; vous lui disiez donc : — « En vain j’ai voulu, Madame, sortir de mon oisiveté passée… quelques mots bienveillants de vous m’eussent fait persévérer dans cette voie… mais je ne méritais plus même votre intérêt… vous voyant insensible à ces résolutions meilleures, je suis retombé dans mes habitudes passées, j’ai cherché dans de nouveaux égarements l’oubli de bien cruels chagrins.

» Ce ne sont pas, Madame, des reproches que je vous adresse… ce sont d’amers regrets que je vous exprime… Un mot encore… Je n’ai, je le sais, aucun droit à la faveur que j’ose implorer de vous… Ne voyez dans cette demande qu’une de ces folles espérances comme en ont ceux qui, roulant à l’abîme, font des efforts insensés pour ne pas mourir. Enfin… si vous vouliez, Madame, vous si bonne, si généreuse…