Page:Sue - Mathilde, tome 4.djvu/191

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vue sous des faces bien différentes ; un jour, femme éplorée, gémissante, incomprise, comme vous dites… l’autre jour, femme altière, ironique, insolemment coquette, et affichant les théories les plus cyniques ; aujourd’hui, descendant à flatter les goûts vulgaires de mon mari, et le rendant, après tout, heureux comme il peut et comme il veut l’être… demain, le trompant sans remords et usant de l’hypocrisie la plus perfide pour le détacher de sa mère qui me détestait… Eh bien ! ces aspects déjà si divers de mon caractère ne sont encore rien auprès des mystères de mon âme, car je réunis en moi bien des contrastes, Mathilde… ainsi j’ai un besoin immodéré de luxe, d’éclat et d’élégance ; cette passion de briller est poussée chez moi à un tel point, que, je l’avoue à ma honte, j’aurais épousé le vieillard le plus repoussant pour la satisfaire… Eh bien, j’ai pourtant la courageuse patience d’aller m’enterrer en province dans une vie misérable et bourgeoise pour donner à mon mari le temps d’augmenter sa fortune et de me mettre à même de mener à Paris l’existence somptueuse que j’ai toujours rêvée, et