Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1865-1866.djvu/218

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      Après l’avoir laissé salir !
Qu’il défende à l’azur de jouer sur ses côtes,
      A son sang noir de dégoutter !
Que tous ces paysans rachetés de leurs fautes
      Aient un peu l’air de s’en douter !
Qu’on voie au noir zénith resplendir une palme,
      Et tous les spectres se lever
Pour accuser le jour d’avoir avec ce calme
      Laissé ce crime s’achever !

Mais le cri de Jésus ne troublait point les mondes :
      Ils sont esclaves de leur poids ;
Et les os demeuraient dans les bières profondes,
      Car c’est de la chaux dans du bois.
Le Golgotha brillait, car les rayons solaires
      Laissent l’ombre dans les lieux bas ;
Les badauds allaient voir, car les hommes d’affaires
      Pour un pendu ne sortent pas ;
Une mère pleurait, l’événement l’explique :
      Son fils mourait, bien qu’il fût Dieu ;
Elle avait mal compris cette métaphysique,
      Car les femmes raisonnent peu.
Ces bourreaux devaient tous frapper dans l’ignorance,
      Car le Juif était condamné,