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les vaines tendresses.


Sur mes parcs, mes greniers, mes caves,
Par-dessus fossé, grille et mur,
Je lâcherais tous mes esclaves
Comme des ramiers dans l’azur !

Tout mon harem, filles et veuves,
S’en retournerait au foyer,
Pour enfanter des races neuves
Que nul tyran ne pût broyer,

Qui ne fussent plus la curée
D’un vainqueur, suppôt de la mort,
Mais serves d’une loi jurée
Dans un libre et paisible accord,

Fondant la cité juste et bonne
Où chaque homme en levant la main
Sent qu’il atteste en sa personne
La dignité du genre humain !

Et moi qui fuis même la gêne
Des pactes librement conclus,
Moi qui ne suis roseau ni chêne,
Ni souple, ni viril non plus,