Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1878-1879, 1886.djvu/218

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Quand deux états rivaux, aux bornes mitoyennes,
Pour se les disputer lèvent leurs étendards,
Et qu’après maint exploit, tous, conscrits et soudards,
Ont amplement fourni la pâture aux hyènes,

Il se peut qu’en changeant les frontières anciennes
La victoire à l’aveugle ait mieux taillé les parts,
Ou que le favori de ses sanglants hasards
Occupe iniquement les terres qu’il fait siennes :

N’importe ! quels qu’ils soient, les arrêts du canon
Demeurent viciés, équitables ou non :
La sentence du meurtre est toujours immorale.

Chaque ennemi par l’autre est devant Dieu cité ;
Mais le juge est suspect dans chaque cathédrale,
Où l’encens le provoque à la complicité.




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