Page:Sully Prudhomme - Œuvres, Poésies 1879-1888.djvu/181

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Et l’aspiration qui gonfle sa narine
Tient longtemps arrêté son souffle eu sa poitrine.
Enfin, pale, au plaisir profond dont il jouit
Il succombe épuisé, pleure et s’évanouit…

Il a penché sa face, où la mort semble empreinte,
Sur le cœur de Stella qui voit sans nulle crainte,
Tel qu’un adorateur s’inclinant sur l’autel,
Défaillir son ami qu’elle sait immortel.
Dans un ruisseau qu’embaume une herbe délicate
Elle puise à deux mains un salubre aromate
Et l’en arrose. Il donne aux choses d’alentour
Un regard vague et lent, qu’il pose avec amour
Sur celle dont les soins et le serein visage
Lui rendent de ses yeux le plus céleste usage.
Dans la main qu’il attire et baise avec ferveur
Du cordial puissant il goûte la saveur.

stella

______Viens maintenant boire à sa source
______Cette précieuse liqueur,
Qui t’offre une innocente et facile ressource
______Pour renouveler ta vigueur.

______Jadis le carnage des bêtes
______Pour te nourrir t’était vendu :
Jamais pareil festin ne souillera nos fêtes ;
______Ici, plus de sang répandu !