Page:Sully Prudhomme - Poésies 1866-1872, 1872.djvu/162

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L’UNE D’ELLES


 
Les grands appartements qu’elle habite l’hiver
Sont tièdes. Aux plafonds, légers comme l’éther,
           Planent d’amoureuses peintures.
Nul bruit ; partout les voix, les pas sont assoupis
Par la laine opulente et molle des tapis
           Et l’ample velours des tentures.

Aux fenêtres, dehors, la grêle a beau sévir,
Sous ses balles de glace à peine on sent frémir
           L’épais vitrail qui les renvoie ;
Et la neige et le givre aux glaciales fleurs
Restent voilés aux yeux sous les chaudes couleurs
           De longs rideaux brochés de soie.

Là, dans de vieux tableaux, le ciel vénitien
Prête au soleil de France un effluve du sien ;
           Et sur la haute cheminée,
Dans des vases ravis en Grèce à des autels,