Page:Swift - Opuscules humoristiques - Wailly - 1859.djvu/91

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maîtresse, quand vous avez envie d’aller au cabaret ; glissez-leur secrètement, de temps à autre, une tranche de pain et un peu de viande froide, cela ne ruinera pas vos maîtres ; et si l’État ne s’est pas encore chargé de son logement, faites-le coucher dans l’écurie ou la remise, ou sous l’escalier de derrière, et recommandez-le à tous les messieurs qui fréquentent votre maison, comme un excellent domestique.

Vieillir dans les fonctions de valet de pied est le plus grand de tous les déshonneurs ; c’est pourquoi, quand vous voyez venir les années sans espoir d’une place à la cour, d’un commandement dans l’armée, d’une promotion au grade d’intendant, d’un emploi dans le revenu (ces deux derniers ne s’obtiennent pas sans savoir lire et écrire), ou d’enlever la nièce ou la fille de votre maître, je vous recommande expressément d’aller sur le grand chemin, c’est le seul poste d’honneur qui vous reste ; vous y rencontrerez beaucoup de vos anciens camarades, vous y mènerez une vie courte et bonne, et vous ferez figure à votre jour suprême, pour lequel je veux vous donner quelques instructions.

Mon dernier avis est relatif à votre conduite quand vous allez être pendu ; ce qui, pour vol domestique ou avec effraction ou sur le grand chemin, ou pour avoir tué, dans une querelle d’ivrogne, le premier homme que vous avez rencontré, sera bien probablement votre lot, et est dû à une de ces trois qualités : amour de la société,