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PARTAGE DE LA POLOGNE. L’EXÉCUTION. )85

portait toujours à dissimuler ses projets de conquête sous les apparences d’une protection et d’une amitié désintéressées. Elle espérait, par les seuls moyens de douceur arriver à son but, c’està-dire amoindrir autant que possible la situation de la Prusse, et comprimer par là une rivale dangereuse, en se donnant aux yeux des Polonais le mérite de les soutenir contre leurs odieux ennemis, les Allemands. Igelstrœm et Sievers devaient se compléter l’un par l’autre; le premier devait représenter la toute-puissance inflexible de la Russie, le second devait être l’organe des sentiments affectueux de la czarine à l’égard des Polonais. Sievers était alors un vieillard un peu affaibli par l’âge son seul aspect inspirait le respect et une parfaite confiance en sa loyauté incontestée; sa conversation dénotait l’expérience d’une vie longue et active, et une intime connaissance du monde. Tout en lui formait un parfait contraste avec le caractère habituel des Russes. A l’urbanité exquise des manières, au tact délicat des convenances, il joignait une merveilleuse facilité pour le travail et une verve de parole intarissable (1) en un mot, Sievers était l’homme le mieux fait pour gagner tout à la fois la confiance des Polonais et celle de l’ambassadeur prussien, quelque contradictoires que fussent leurs vœux. Sa loyauté fut précisément ce qui lui aplanit le chemin. Il apaisa sur-le-champ la Généralité exaspérée, et domina complétement le faible Potocki. Il ne lui cacha pas que, dans l’état désespéré où se trouvait la république de Pologne, un sacrifice serait peut-être nécessaire mais il lui dépeignit en même temps sous de si séduisantes couleurs les bénédictions que la protection de la grande impératrice répandrait sur le pays en général, et sur lui, Potocki, en particulier, que celui-ci promit de rester à son poste et de faire tous ses efforts pour mériter à l’avenir la faveur de la czarine. C’était tout ce que voulait Sievers, car Catlierine prétendait obtenir des Polonais un traité de cession en règle, et si la confédération s’était dissoute, la Pologne n’eût plus possédé d’organe pour le signer. Sievers se rendit ensuite à Varsovie, où il arriva le 10 février, et où il se mit sur-le-champ en communication avec Mœllendurf (1) Ce sont les propres expressions employées par Buchholz dans une lettre a~ roi, dtt 13 février,