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CHUTE DE LA GIRONDE. 809

règle fixe. Il laissait subsister le mot de propriété, mais il voulait que l’emploi des revenus fût soumis à l’autorité du gouvernement, et il déclarait illicite et immorale toute propriété qui nuisait à la liberté ou aux possessions d’autrui. Bien que ces principes laissassent le champ libre à toutes les prétentions des prolétaires, les Jacobins se montrèrent mécontents d’un système qui ne permettait pas à chacun de puiser dans la bourse de son voisin et qui n’attribuait qu’à l’État le pouvoir de disposer des propriétés privées. Aussi Boyssel provoqua-t-il de bruyants applaudissements lorsque, immédiatement après la proclamation des Droits de l’homme de Robespierre, il proclama à son tour les Droits des sans-culottes jouissance et usufruit de toutes les productions, droit au vêtement et à la nourriture, droit de multiplier la race des sans-culottes. Telles étaient les opinions que la Montagne apportait dans la discussion définitive qui allait s’ouvrir, au sujet des demandes faites le 18 par le Département. On vit sur-le-champ qu’ici, de même que dans le procès de Louis XVI, on ne combattrait pas par des arguments, mais par la violence matérielle. Des adresses arrivaient de tous côtés, des bandes d’hommes du peuple, d’un extérieur misérable et menaçant, étaient introduites dans la salle à titre de pétitionnaires, et l’opposition des Girondins était étouffée par le bruit des tribunes. Le 27 avril, un nouvel élément de fermentation arriva des provinces à la Convention. Les patriotes de Montpellier annoncèrent que, une petite armée espagnole ayant violé les frontières des P’yrénées, ils avaient, de leur autorité privée, opéré une levée supplémentaire de cinq mille hommes et établi sur leurs concitoyens riches un emprunt forcé de 5 millions. La Convention décida que ce rapport serait envoyé aux autres départements comme un modèle de sentiments patriotiques, et Danton, qui était alors en désaccord avec les Jacobins au sujet de la politique extérieure, s’empressa de reconquérir leur affection en déclarant que cette décision était une reconnaissance officielle de la conduite à tenir et un encouragement à agir de même. La Municipalité parvienne n’attendit pasquecette exhortationlui fût répétée. A l’exemple de Montpellier, elle résolut sur-le-champ de mettre sur pied douze mille hommes destinés à combattre les Vendéens, et de se procurer les moyens de subvenir à cette dé-