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894 RÈGNE DE LA TERREUR EN FRANCE.

les détails de l’exécution des mesuras qu’il avait proposées mais ici, à la grande satisfaction de la Convention et du Comité, Danton s’interposa et fit remarquer que, dans la confusion qui régnait alors, on ne pourrait se procurer ni armes ni vivres. Cette question fut alors renvoyée au Comité, qui, entrant dans les idées de Danton, osa déclarer le 23 que la levée générale était une utopie destinée à provoquer les railleries des aristocrates. Enfin parut cette loi célèbre qui déclarait soumis au service actif tous les citoyens français de dix-huit à vingt-cinq ans, consacrait 80 millions à l’établissement de fabriques d’armes, et appelait provisoirement tous les jeunes gens au chef-lieu de chaque district pour y être exercés au maniement des armes. Quant à expulser les suspects ou’ à les conduire sur les champs de bataille, il n’en fut plus question l’idée de la levée en masse ne fut plus agitée que dans quelques districts des frontières, où des commissaires hébertistes envoyaient dans les camps des. paysans sans armes, ou armés seulement de piques, et accompagnés souvent de leurs femmes et de leurs enfants, au grand effroi des généraux.

Cette grande mesure de salut public fut donc ramenée, en effet, aux proportions d’un simple recrutement, mais d’un recrutement extraordinaire et sans exemple jusque-là. Il est facile de comprendre que cette mesure ne devait profiter aux armées avant plusieurs mois, et ne pouvait, par conséquent, être d’aucun secours dans le danger actuel; nous verrons même plus tard que, par suite de la perversité des chefs démocratiques, l’effet en fut retardé plus qu’il n’aurait dû l’être. Si ce recrutement a toujours été considéré comme le point. de départ du changement ’qui s’opéra dans les destinées de la guerre, et si la levée en masse, quoique rejetée expressément par la Convention, a constamment passé pour avoir sauvé la France du joug de l’étranger, on ne doit donc voir là qu’une de ces grandes fables dont abonde l’histoire de la Révolution.

Le parti de l’Hôtel de Ville vit avec colère l’échec d’un plan si bien combiné et sur lequel il fondait tant d’espoir. Ce fut surtout sur Danton que retomba cette colère, et bientôt une déception personnelle éprouvée par Hébert amena une rupture auyerte entre ces deux chefs. Il s’agissait dénommer un ministre