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408 RÈGNE DE LA TERREUR EN FRANCE.

reur, le seul marchand, le seul industriel du pays, de se charger de tous les soucis, de tous les travaux de la société civile, et de mesurer aux masses oisives et pauvres leur portion de pain quotidienne. Le système des réquisitions, qui le supposait le propriétaire suprême de toute chose, se développa par l’application même le 20 septembre, tous les matériaux propres à la construction des navires, le 27, tous les arbres pouvant fournir des bois de charpente, le 4 octobre, tous les bâtiments de commerce du pays furent mis à la disposition de l’État, qui déterminait seul le prix qu’il voulait en donner; le 29 septembre enfin, il posa en principe que les marchandises de tout genre seraient taxées au prix moyen de 1790 plus un tiers en sus, et que le salaire do la main d’œuvre, établi d’après la même base, serait augmenté de moitié. Une commision spéciale fut chargée de fixer ces diverses valeurs.

Telles furent les mesures prises contre la liberté de la propriété quant à la liberté individuelle, la loi du 17 septembre déclarait suspect quiconque se montrerait en quoi que ce fùl ami de la tyrannie, quiconque ne payerait pas exactement ses impôts, quiconque ne recevrait pas de carte civique des autorités locales ou des chefs de sa section. Or, comme la carte civique était délivrée, par la commune et devait être légalisée par le comité révolutionnaire, qui pouvait la refuser à son gré, cette disposition mettait partout la liberté des citoyens à la merci des hommes que leur zèle patriotique avait fait nommer membres du comité par leur club ou par les commissaires de la Convention. Tout suspect devait être arrêté et gardé à ses frais, jusqu’à la paix, dans des locaux désignés à cet effet.

Quelque incroyable que cela puisse paraître, cette toute-puissance exercée sur les personnes et sur les propriétés ne suffisait pas encore aux chefs du parti de l’Hôtel de Ville. La Convention ayant décrété le 18 septembre que les propagateurs de fausses nouvelles relativement à la guerre seraient déportés à Cayenne, Collot d’Herbois demanda que l’on donnât un effet rétroactif à cette loi. Un reste de pudeur ou d’humanité, dont le Dantoniste Thuriot se fit l’interprète, ayant fait rejeter cette motion, Collot d’IIerbois proposa que les prisons où étaient enfermés les suspects fussent minées, en dessous, afin qu’on pût les faire sauter à la