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SITUATION DU PAYS. M&

les arrivants, ses réponses étaient brèves et froides, mêlées souvent de railleries cyniques lorsqu’on lui demandait une grâce, et formulées à dessein en termes vagues et équivoques lorsqu’il était questionné par ceux qui lui servaient d’instruments. Il avait toujours à sa table une troupe de joyeux viveurs et de femmes de mauvaise vie, signait les condamnations a mort pendant ses repas, et buvait à la prospérité de la République au bruit de la mitraille qui frappait les condamnés sur la place des exécutions.

Tandis que ces atrocités ensanglantaient la seconde ville du pays, la bourgeoisie de Toulon persévérait dans sa résistance. Les puissances alliées s’étaient empressées d’augmenter la garnison de cette place, qui se composait en septembre de six mille cinq cent vingt et un Espagnols, deux mille quatre cent vingt et un Anglais, quatre mille trois cent trente-quatre Napolitains, quinze cent quatre-vingt-quatre Piémontais et quinze cent quarante-deux gardes nationaux toulonnais, en tout plus de seize mille hommes (1), avec lesquels, vu la faiblesse des troupes ennemies, un général énergique aurait pu opérer en Provence une diversion dangereuse pour les Français. Mais les vices qui avaient déjà été si funestes aux grandes opérations pendant la guerre de la coalition se renouvelèrent ici sur une plus petite échelle. La ville était divisée en deux partis, les partisans de la constitution de 1789 et les aristocrates royalistes le malheur voulut que cès partis, en s’attachant chacun une des puissances alliées, les enveloppassent toutes deux dans leur querelle, Les Anglais protégeaient les constitutionnels, parmi lesquels on comptait toutes les autorités et qui, par conséquent, formaient la représentation officielle de la bourgeoisie. Les Espagnols, au contraire, prenaient avec chaleur le parti de la minorité royaliste, avec laquelle ils se trouvaient en harmonie de zèle religieux, et d’opinions sur les mesures à prendre. Il s’établit donc surtoutes les questions d’une importance secondaire des dissensions qui paralysaient les mouvements, soit politiques, soit militaires. Lors(1) Ceci et ce qui suit est tiré du rapport d’un témoin oculaire Ml roi de Prusse. Je le reproduis d’autant plus en défaits que Fiu~toire de la ville de Toulon, à cette époque, est restée jusqu’ici tout Ii. fait inconnue, et a été défigurée par tes récits les plus romanesques (notamment dans r~i’t~M’ si savante d’ailleurs, ~t< département f/M !’at’, par Lauverguu).