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SITUATION DU PAYS. M3

hauteurs, les républicains commençaient à lancer des bombes sur ces masses confuses. La presse et le désespoir devinrent tels que les vaisseaux durent, de leur côté, faire feu sur ceux qui leur demandaient du secours, afin d’éviter un encombrement fatal. Le 19 enfin, tout était terminé. Plus de quatre mille Toulonnais, parmi lesquels se trouvaient tous ceux qui avaient pris une part quelconque à la rébellion, étaient entassés sur les deux flottes. Les Anglais emmenèrent avec eux une partie des vaisseaux de guerre français quant aux autres, ils y mirent le feu avant de s’éloigner, ainsi qu’à une partie de l’arsenal. Lorsque les colonnes républicaines entrèrent dans Toulon, elles y trouvèrent les rues désertes et les maisons fermées; on eût dit une ville morte. La première nouvelle que quelques Jacobins apportèrent aux représentants du peuple Fréron, Barras et Robespierre le jeune, fut que les principaux coupables s’étaient enfuis; mais Fréron répondit qu’il ne manquerait pas de victimes, attendu que la ville entière s’était rendue coupable de trahison et couverte d’ignominie..A l’arsenal, quatre cents ouvriers de la marine environ vinrent à sa rencontre; apprenant qu’ils avaient travaillé pendant l’occupation étrangère, il les fit mettre à mort sur-le-champ. Il voulait exterminer en masse la population; dans ce but, il ordonna, le troisième jour après son arrivée, de réunir tous les habitants sur une grande place exposée aux batteries d’un bastion, afin de les faire tomber sous le feu de l’artillerie. Mais, de même qu’à Lyon, l’armée se refusa à jouer le rôle de bourreau, et le général Dugommier résista avec une généreuse indignation aux ordres du représentant. Fréron eut alors recours à une bande révolutionnaire que l’on nommait les Allobroges; c’était dans l’origine une légion de volontaireg savoyards, qui s’était transformée par la suite en un ramassis de tous les vagabonds sans aveu du sud de la France, et qui avait déjà montré à Marseille de quoi elle était capable. Fréron organisa, grâce à ce secours, une fusillade républicaine qui dura pendant trois jours plus de huit cents habitants, désignés par le sort ou par le chiffre de leur fortune, tombèrent ainsi sous les balles. On établit ensuite un tribunal révolutionnaire qui fit égorger dans l’espace de trois mois plus de dix-huit cents hommes, sans que l’on s’inquiétât de preuves ou d’enquête. Un