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64 COMMENCEMENT DE LA GUERRE ANGLO-FRANÇAISE.

et de revers, ces Whigs avaient succombé devant le talent de Pitt, qui, pour mieux résister à leur influence aristocratique, avait su gagner à la cause de la couronne les capitalistes et la haute bourgeoisie. Lorsque, plus tard, la Révolution française remplit le monde de ses maximes démocratiques, le parti des Whigs, sous l’influence du caractère énergique de Burke, se divisa en deux fractions, dont l’une était mue par des sentiments d’aristocratie, l’autre par un esprit d’opposition, dont l’une n’écoutait que son hostilité de principes envers la France, l’autre sa haine momentanée contre le ministère. Actuellement, un comptait trois fractions dans cette opposition la première, tout aristocratique et conservatrice, était dirigée par Burke et assez bien disposée pour le gouvernement, auquel elle attribuait cependant plus d’esprit de domination que de fermeté de principes; la seconde, sous la direction ostensible de l’excellent mais faible duc de Portland, et complètement menée, en réalité, par Fox, était composée de membres aristocratiques encore, mais dont les tendances étaient libérales, véritables réformateurs de cette époque, qui, avec les sentiments du plus loyal patriotisme anglais, se sentaient portés à une alliance avec la France; la troisième ne comptait parmi ses membres que des républicains avoués, en relation avec les clubs et les Irlandais, faibles comme nombre au parlement, mais inquiétants pour le gouvernement, car ils servaient d’intermédiaires entre Fox et les clubs. Dans la question qui remplissait alors la scène politique, Pitt pouvait compter sur la première de ces fractions, qui l’accusait même de tiédeur à l’égard de la France, mais il fallait qu’il parvînt à gagner ou à dissoudre la seconde et à terrasser la troisième. Il essaya d’attirer au ministère le duc de Portland et quelques-uns de ses amis; mais il échoua par suite de l’influence que Fox exerçait sur le faible esprit du duc. Son triomphe n’en fut que plus décisif en dehors du Parlement. La tyrannie populaire qui régnait en France avait produit une vive impression de l’autre côté du détroit. Le tiers état d’Angleterre s’était enthousiasmé pour le serment du Jeu de Paume et pour la prise de la Bastille mais le 10 août l’inquiéta et les massacres de septembre le remplirent d’horreur. Il se souvint alors de tout ce qu’il devait à la constitution britannique et surtout au ministère Pitt. La milice accourut en foule aux lieux de convoca-