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80 COMMENCEMENT DE LA GUERRE ANGLO-FRANÇAISE.

mentionnée. « L’appel au peuple, dit-il, c’est le rétablissement du trône, car la délivrance du tyran implique le renouvellement de la tyrannie. » Ainsi donc, il était si positif à ses yeux que la masse de la nation réunie en assemblées primaires sauverait le roi, qu’il admettait ce fait sans même le discuter. Cependant, il chercha à inspirer à la Convention le courage de décider ellemême en lui disant: « Ce n’est pas vous qui êtes les accusateurs et les juges, mais bien la nation qui agit par votre intermédiaire.’) Il ne se faisait donc pas scrupule de diriger la toute-puissance donnée par le pays dans un sens diamétralement opposé à la volonté évidente de la nation.

Quelques jours auparavant, Robespierre avait déclaré, que même à la volonté souveraine du peuple n’appartenait pas le droit de décréter l’abolition de la République. Saint-Just tira de ces paroles cette simple conséquence « Comme le salut du roi serait dangereux pour la République, nous défendons au peuple souverain d’avoir la volonté de le sauver. » Il était impossible de déclarer plus formellement que la France ne partageait point les désirs de son parti, et que ce parti était décidé à asservir la France.

Salles, qui succéda à Saint-Just, exposa le programme nouveau adopté par la Gironde; ce programme montrait la position des Girondins tout aussi clairement que les paroles impérieuses de Saint-Just avaient fait connaître celle de la Montagne. Salles commença, en effet, par reconnaître indirectement que la masse de la nation française tenait peu à !a République, car il déclara que le jugement de Louis XVI était nécessaire pour réprimer les royalistes; en d’autres mots, il avoua que ce n’était qu’en déclarant solennellement Louis XVI coupable de trahison qu’on pourrait empêcher la nation de le replacer sur le trône. Mais ensuite, il demanda instamment que le jugement fùt soumis au peuple, afin d’apaiser les autres nations de l’Europe. On vitici quelle impression les derniers événements de la guerre avaient faite sur le parti de la Gironde; il est impossible d’imaginer un désaveu plus absolu à de ses anciennes espérances que celui qu’il montra dans ces débats. Pour la première fois, on entendit énumérer énergicm~tnent et sans voiles a la Convention tous les crimes et tous Fe~ dangers dans lesquels la politique