Page:Tabourot - Les Bigarrures et Touches du seigneur des Accords - 1640.djvu/254

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Quelques-uns faisans jugement de nos Poësies Françoises & Italiennes, disent que selon les vieux Romans, elles sont descenduës de ces vers Leonins : mais aujourd’huy elles out esté tellement faites nostres par l’usage, qu’elles y ont pris une propre & naysve grace. Et combien que quelques-uns ayent voulu, depuis peu de temps en çà, reformer vostre Poësie, selon les quantitez & mesures Latines, cela est si froid que rien plus, estanc bien asseuré que telles œuvres ne vivront pas, je ne dy pas que pour plaisir, & pour donter la Romaine arrogance, nous n’en puissions faire par forme desbat, dont les reigles toutesfois (quoy que dient nos nouveaux scandeurs) sont ad libituin, juxta illud :

Ad libitum pono nomina nescio quæ.

Comme pour exemple tu as la version du vers,

Cum fueris, fælix, multos numerabis amicos,
Tempora si fuerint nubila solus eris.

Fait par l’Official Langrois, 1570.

Tant que seras opulent, amis auras par chemin assez,
Chacun s’enfuit a quand miserable feras.

Jodelle a faict ce Distique,

Phœbus, Amour, Cypris, &c. cy-dessus mis au chapitre des Vers rapportez.

Le Comte d’Alsinois a aussi faict ces suivans,

Voy derechef, ô alme Ventis, Venus, álme, rechanter
Ton los mortel par ce Poëte sacré :
Voy derechef un vers animé, vers digne de ton nom.
Vers que la Brauce reçoit, vers que la France lira :
Et fais qu’en resonnans ton los il puisse de ses vers,
Par ta benigne faveur, vaincre la force d’Amour.

Le mesme Comte saņs Comté a fait ce suyvant Phaleuce.