Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/115

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Tibère lui répondit avec ménagement "que, s’il avait agi sans fraude, il devait se reposer sur son innocence ; qu’au reste ni lui ni le sénat ne pourraient discerner qu’après un mûr examen le tort du bon droit ; qu’il livrât donc Cotys, et qu’en venant lui-même il détournât sur son adversaire le soupçon du crime." Latinius Pandus, propréteur de Mésie, lui envoya cette lettre, avec des soldats chargés de recevoir Cotys. Rhescuporis, combattu quelque temps par la crainte et par la colère, aima mieux avoir à répondre d’un attentat consommé que d’être coupable à demi : il fait tuer Cotys, et publie qu’il s’est donné la mort. Cependant Tibère ne renonça pas à sa politique artificieuse : Pandus que Rhescuporis accusait d’être son ennemi personnel, venait de mourir ; il mit à sa place Pomponius Flaccus, homme éprouvé par de longs services, et qui, lié d’une étroite amitié avec le roi, en était plus propre à le tromper : c’est là surtout ce qui lui fit donner le gouvernement de la Mésie.

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Flaccus passe dans la Thrace, et, calmant à force de promesses les craintes que donnait à Rhescuporis une conscience criminelle, il l’attire au milieu des postes romains. Là on l’entoure, comme par honneur, d’une garde nombreuse ; puis, à la persuasion des tribuns et des centurions, il s’engage plus avant ; et, tenu dans une captivité chaque jour moins déguisée, comprenant enfin qu’il ne peut plus reculer, il est traîné jusqu’à Rome. Il fut accusé devant le sénat par la veuve de Cotys, et condamné à rester en surveillance loin de son royaume. La Thrace fut partagée entre son fils Rhémétalcès, qui s’était opposé à ses desseins, et les enfants de Cotys. Ceux-ci étant très jeunes encore, on donna la régence de leurs États à Trébelliénus Rufus, ancien préteur, de même qu’autrefois on avait envoyé en Égypte M. Lépidus pour servir de tuteur aux enfants de Ptolémée55. Rhescuporis fut conduit à Alexandrie, où une tentative d’évasion, réelle ou supposée, le fit mettre à mort.

55. Immédiatement après la fin de la seconde guerre punique et avant la guerre de Macédoine.

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À la même époque, Vonon, relégué en Cilicie, comme je l’ai rapporté, corrompit ses gardiens et entreprit de se sauver en Arménie, de là chez les Albaniens et les Hénioques56,