Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/176

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La même année mit de nouveau le prince en deuil, en lui ravissant un des jumeaux de Drusus, et un ami dont la perte ne l’affligea pas moins. C’était Lucilius Longus, le compagnon de sa bonne et de sa mauvaise fortune, et le seul des sénateurs qui l’eût suivi dans sa retraite de Rhodes. Aussi, quoique Lucilius fût un homme nouveau, un sénatus-consulte lui décerna, aux frais du trésor, des funérailles solennelles et une statue dans le forum d’Auguste. Car toutes les affaires se traitaient encore dans le sénat. C’est même par ce corps que fut jugé Lucilius Capito, procurateur d’Asie, accusé par la province. Tibère protesta hautement qu’il ne lui avait donné de pouvoir que sur ses esclaves et sur ses domaines particuliers ; que, si son intendant s’était arrogé les droits d’un gouverneur et avait employé la force militaire, c’était au mépris de ses ordres ; qu’ainsi on écoutât les plaintes des alliés. Le procès fut instruit et Capito condamné. Reconnaissantes de cet acte de justice, et de la vengeance qu’elles avaient obtenue l’année précédente contre Silanus, les villes d’Asie décernèrent un temple à l’empereur, à sa mère et au sénat. On leur permit de l’élever, et Néron adressa pour elles au sénat et à son aïeul des actions de grâces qui excitèrent dans tous les cœurs de douces émotions. La mémoire de Germanicus était encore présente ; on croyait le voir, on croyait l’entendre. La modestie du jeune homme, son air noble et digne d’un si beau sang, ajoutaient à l’illusion et s’embellissaient de tout ce que la haine trop connue de Séjan lui préparait de dangers.

Affaires religieuses

Un nouveau flamine

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Vers le même temps mourut le flamine de Jupiter, Servius Maluginensis. Tibère, en consultant le sénat sur le choix de son successeur, proposa de changer la loi qui réglait cette élection. Il dit que l’ancien usage de nommer d’abord trois patriciens nés de parents unis par confarréation13, et d’élire parmi eux le flamine, était devenu d’une pratique difficile, En effet, la confarréation était abolie, ou ne se conservait que dans un petit nombre de familles. Il en donnait plusieurs causes : d’abord l’insouciance des deux sexes ; ensuite les difficultés mêmes de la cérémonie, que l’on aimait à s’épargner ; enfin l’intérê