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Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/273

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des transfuges ; enfin, parvenu à former une armée, il chasse le roi des Dandarides4 et s’empare de ses États. A cette nouvelle, qui menaçait le Bosphore d’une prochaine invasion, Aquila et Cotys, se défiant de leurs forces, et voyant que Zorsinès, roi des Siraques, avait recommencé les hostilités, cherchèrent aussi des appuis au dehors : ils députèrent vers Eunone, chef de la nation des Aorses. L’alliance ne fut pas difficile à conclure : Eunone avait à choisir entre la puissance romaine et le rebelle Mithridate. On convint qu’il fournirait de la cavalerie, et que les Romains assiégeraient les villes.

4. Strabon compte les Dandari parmi les Méotes, peuples Sauromates ou Sarmates, qui habitaient sur la côte orientale de la mer d’Azof (les Palus-Méotides), entre le Kuban et le Don ou Tanaïs. Il place dans les mêmes contrées les Aorses et les Siraques, répandus vers le midi, jusqu’aux monts Caucasiens.

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Alors on s’avance en bon ordre, ayant en tête et en queue les Aorses, et au centre nos cohortes avec les troupes du Bosphore, armées à la romaine. L’ennemi est repoussé, et l’on arrive à Soza, ville de la Dandarique, abandonnée par Mithridate, où, à cause des dispositions équivoques des habitants, on laissa garnison. Marchant ensuite contre les Siraques, on passe le fleuve Panda ; et l’on investit la ville d’Uspé, située sur une éminence et défendue par des fossés et des murs. Mais ces murs, construits, au lieu de pierre, avec de la terre soutenue des deux côtés de claies et de branchages, ne pouvaient tenir contre un assaut. Nos tours, plus élevées, lançaient des torches et des javelines qui jetaient le désordre parmi les assiégés, et, si la nuit n’eût mis fin au combat, le siège eût été entrepris et achevé en un jour.

17

Le lendemain, des députés vinrent demander grâce pour les personnes libres et offrir dix mille esclaves. Les vainqueurs rejetèrent cette proposition : massacrer des gens reçus à merci eût été barbare ; garder tant de prisonniers était difficile. On aima mieux qu’ils périssent par le droit de la guerre. Déjà les soldats avaient escaladé les murs : on leur donna le signal du carnage. Le sac d’Uspé intimida les autres villes. Elles ne voyaient plus de rempart assuré contre un vainqueur que n’arrêtaient ni armes ni retranchements, ni bois ni montagnes, ni fleuves ni murailles. Zorsinès réfléchit longtemps s’il risquerait le trône de ses pères pour la cause désespérée de Mithridate. Enfin l’intérêt de sa maison prévalut : il donna des