Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/375

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dont de vastes plaines facilitaient la course. Pétus alla passer l’hiver dans la Cappadoce. Bientôt Vologèse envoya sommer Corbulon de retirer les postes qu’il avait au delà de l’Euphrate, afin que le fleuve séparât comme autrefois les deux empires. Corbulon demandait à son tour que les garnisons des Parthes sortissent de l’Arménie : le roi finit par y consentir. Les ouvrages élevés par Corbulon de l’autre côté de l’Euphrate furent démolis, et les Arméniens restèrent sans maîtres.

A Rome

Trophées pour la défaite des Parthes - Néron fait jeter le blé usagé dans le Tibre

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Cependant, à Rome, on érigeait des trophées pour la défaite des Parthes, et, sur le penchant du mont Capitolin, s’élevaient des arcs de triomphe ordonnés par le sénat quand les chances de la guerre étaient entières, et continués malgré nos revers, pour flatter les yeux en dépit de la conscience publique. Afin de mieux dissimuler ses inquiétudes sur les affaires du dehors, Néron fit plus : une partie des blés destinés au peuple étaient vieux et gâtés ; il les jeta dans le Tibre, comme sûr de l’abondance ; et quoiqu’une tempête eût submergé dans le port même prés de deux cents navires, et qu’un incendie en eût consumé cent autres qui avaient déjà remonté le fleuve, le prix des vivres ne fut point augmenté. Le prince confia ensuite les revenus publics à trois consulaires, L. Pison, Ducennius Géminus et Pompéius Paulinus, en blâmant ses prédécesseurs "d’avoir, par l’énormité de leurs dépenses, excédé la mesure des recettes : lui, au contraire, faisait à la république un présent annuel de soixante millions de sesterces."

Adoptions simulées

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Une coutume des plus condamnables s’était établie vers ce temps. A l’approche des comices, ou lorsqu’on était près de tirer au sort les provinces, beaucoup de gens sans enfants se donnaient des fils par de feintes adoptions5, et à peine avaient-ils concouru, à titre de pères, au partage des prétures et des gouvernements, qu’ils émancipaient ceux qu’ils venaient d’adopter. Des plaintes amères furent portées au sénat ; on fit valoir "les droits de la nature, les soins de l’éducation, contre des adoptions frauduleuses, calculées, éphémères. N’était-ce pas assez de privilèges pour les hommes sans enfants, de voir,