Page:Tacite - Œuvres complètes, traduction Burnouf, 1863.djvu/531

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et la fortune de Vitellius sur le penchant de sa ruine. Ce vous sera plaisir alors de me suivre et de marcher sur les traces du vainqueur."

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Ces paroles et d’autres semblables, qu’il débita les yeux en feu et d’une voix tonnante, afin d’être entendu de plus loin (car les centurions et quelques soldats s’étaient mêlés à la délibération), entraînèrent jusqu’aux esprits timides et prévoyants. Quant à la multitude, il n’y eut plus pour elle qu’un seul homme un seul général, auprès duquel tout le reste était une troupe de lâches. C’est l’impression que Primus avait donnée de lui-même dés l’assemblée où furent lues les lettres de Vespasien1. Là au lieu de tenir comme les autres un langage équivoque, qu’il pût un jour interpréter au gré de sa politique, il s’était déclaré avec une franchise qui le rendait cher aux soldats, comme le complice de leur faute ou le compagnon de leur gloire.

1. Voy. liv. II, chap. LXXXII.

4

Le procurateur Cornélius Fuscus exerçait après lui la principale influence. Cet homme, à force de se déchaîner contre Vitellius, s’était aussi ôté toute espérance en cas de revers. T. Ampius Flavianus, par la lenteur de son caractère et de son âge, éveillait la défiance des soldats ; on le soupçonnait de n’avoir pas oublié ses liens de famille avec Vitellius ; et, comme il s’était enfui au premier mouvement des légions et qu’il était ensuite revenu de lui-même, on attribuait son retour à de perfides desseins. Il est vrai que Flavianus, après s’être retiré de Pannonie en Italie, où il pouvait attendre la crise sans se commettre, fut entraîné par l’amour des changements et les conseils de Cornélius Fuscus à reprendre son titre de lieutenant et à se jeter dans la guerre civile. Ce n’est pas que Fuscus eût besoin des talents de Flavianus ; mais il voulait couvrir le parti naissant de l’éclat d’un nom consulaire.

5

Au reste, afin de pouvoir impunément et avec fruit entrer en Italie, on écrivit à Aponius Saturninus d’amener les troupes de Mésie en toute diligence, et, pour ne pas laisser à la merci des barbares les provinces dégarnies, on appela dans les rangs de l’armée les chefs les plus puissants des Sarmates Iazyges2. Ils offraient aussi le gros de leur nation et cette redoutable cavalerie qui en fait toute la force. On les remercia de cette offre, de peur qu’au milieu de nos discordes ils ne se