Page:Tacite - Oeuvres complètes, trad Panckoucke, 1833.djvu/245

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sous les coups et les opprobres, à des travaux au milieu des bois et des marais. Les malheureux nés dans l’esclavage, une seule fois vendus, sont nourris par leurs maîtres : la Bretagne achète chaque jour sa propre servitude, chaque jour elle l’entretient. Et, comme dans une maison le plus nouveau des esclaves est le jouet même de ses camarades, ainsi, dans cet antique servage du monde, nouveaux et méprisés, nous sommes destinés à être victimes. Nous n’avons point, en effet, des champs, des mines, ou des ports aux travaux desquels on puisse nous réserver ; nous n’avons que du courage et de la fierté, vertus insupportables à des dominateurs ; et plus notre éloignement et le mystère de nos retraites nous protègent, plus nous sommes suspects. Ainsi, perdant tout espoir de pardon, enfin prenez courage, et vous à qui la vie, et vous à qui la gloire est la plus chère. Les Trinobantes, conduits par une femme, ont pu incendier la colonie des Romains, dévaster leur camp ; et, si leur prospérité ne les eût endormis, ils eussent secoué à jamais le joug. Nous, intacts et indomptés, nous qui n’avons point à conquérir une liberté, dès le premier choc ne montrerons-nous pas quels hommes la Calédonie s’était réservés ?

XXXII. « Croyez-vous aux Romains autant de courage dans la guerre que d’insolence dans la paix ? Ces hommes, qu’ont illustrés nos dissensions et nos discordes, tournent à la gloire de leur armée les fautes de leurs ennemis ; cet assemblage des nations les plus diverses, le succès le maintient, un revers le dissoudra. A moins que vous ne pensiez que ces Gaulois, ces Germains, et, j’ai honte de le dire, ces Bretons qui prêtent leur sang à une tyrannie étrangère, toutefois plus long-