Page:Tacite - Oeuvres complètes, trad Panckoucke, 1833.djvu/93

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dait l’Océan d’Homère comme une mer imaginaire, on s’est obstiné à expliquer géographiquement la route tenue par Ulysse, route aussi peu réelle que les enchantemens de Circé ou les sortilèges de Tirésias. Strabon cherche la descente aux enfers dans les environs du Vésuve, et découvre une ville Odyssea en Espagne ; Solin donne au nom de la ville Olysipo une allusion forcée au nom du roi d’Ithaque ; il connaît en Chalcédoine un autel avec des inscriptions gravées par ce héros, et à peu de distance il nous retrouve même Ogygia, ou l’île enchantée de Calypso. Le poète Claudien connaît parfaitement une caverne des morts dans les Gaules ; et Tacite lui-même ne dédaigne pas de rapporter l’opinion de ceux qui faisaient voyager Ulysse jusqu’au milieu de la Germanie pour y fonder la ville d’Asciburgium. Les érudits modernes ont profité du mauvais exemple donné par les anciens : on les a vus retrouver l’île de Circé à Zirikzée, dans la Hollande, et le peuple des Songes dans la Grande-Bretagne ; enfin, il s’est trouvé un Danois qui, après avoir démontré l’identité d’Ulysse et d’Odin, a heureusement conduit ce héros jusqu’au Malstrom, en Norvège, qui, sans doute mieux que le détroit de Sicile, représente la fabuleuse Charybdis d’Homère. (Géogr. de Malte-Brun, tom. i, pag. 227 et 228.)

Asciburgium. On croit que c’est le village d’Asburg, sur la rive gauche du Rhin, près de Mœrs, dans le duché de Clèves.

Inscriptions grecques. On a prétendu que ces tombeaux portaient des caractères runiques ; mais Tacite dit lui-même (ch. ii et xix de cet ouvrage) que les Germains ne connaissaient pas l’écriture. Le plus ancien écrivain qui ait parlé des caractères runiques est Venantius Fortunatus (Carm. vii, 18) ; il vivait vers la fin du sixième siècle :

Barbara fraxineis pingatur runa tabellis.

IV. Les yeux sont tous fiers et bleus. La plupart des habitans du nord de l’Allemagne ont les cheveux blonds et les yeux bleus. Quant à la figure de ces barbares, l’histoire leur donne des cheveux blonds, des yeux bleus, un regard farouche, une voix effrayante, une stature prodigieuse, qu’ils augmentaient encore en mettant sur leur casque des aigrettes de plumes, des ailes d’oiseaux singuliers, des têtes ou d’autres dépouilles d’animaux sauvages.