Page:Taillasson - Observations sur quelques grands peintres, 1807.djvu/26

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perbes productions de la nature, qui, cent ans, embellissent la terre, et qui n’emportent en tombant que des regrets.

Dans les grandes villes, l’homme exilé loin de la nature semble être condamné à ne plus la revoir ; la peinture vient le consoler, elle renverse les murailles qui le renferment, elle lui porte les riantes campagnes ; il croit entendre les flûtes des pasteurs ; il revoit des ruisseaux, des champs, des moissons, des troupeaux, des prés couverts de fleurs, et dans sa prison même, il voit encore le lever du soleil. Eh ! quel peintre eut jamais plus de droits à notre reconnoissance que Claude le Lorrain ? qui mieux que lui sait nous transporter à l’ombre des bois silencieux, aux bords solitaires des lacs brillans comme les cieux qu’ils réfléchissent ? qui mieux que lui nous fait voir cet air pur que nous ne respirons plus, nous offre l’innocence et la paix qui n’habitent que dans les champs fortunés, et dont l’image porte encore dans nos âmes de si doux souvenirs ?

Ô vous, jeunes élèves, qui vous sentez entraînés par le plaisir de peindre le paysage, si véritablement vous reçûtes, en naissant, l’instinct, le feu sacré qui fait les grands artistes,