Page:Taine - Carnets de voyage, 1897.djvu/125

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trois choses, rien de plus. Une raie de rochers violacés et tendrement veloutés à droite ; en face, une autre raie âpre, noirâtre, en repoussoir devant le soleil couchant ; la mer unie, hérissée de tout petits flots uniformes, le grand ciel de saphir — cela se comprend d’un coup et chaque partie est grande.

Cette longue arête des rochers du Lazaret s’allonge comme une échine tranchante, âpre, cassée, avec des pointes et des angles d’une netteté architecturale — toute noire dans la flamme pourprée qui embrase la brume lointaine. Au pied, les flots bleus jouent et s’étalent comme des poissons qui jouissent des derniers rayons.

Mais ma plus belle promenade est celle d’hier matin, à Redon, avec P… Non pas le commencement ; il a voulu me montrer la partie originale de Marseille, la villégiature, les Cabanons, les Grilladous, cela est comique et affreux ; tout Marseille et tous les environs se composent de mamelons nus, âpres, escarpés, formés de pierre blanchâtre, tranchante, fendillée, qui s’effondre, coupés de murs et de petites maisons de cam-