Page:Taine - Carnets de voyage, 1897.djvu/128

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corps ; un sable uni accueille les pieds. En voyant les membres se mouvoir si facilement dans l’eau, on pense aux félicités antiques. Le soleil a beau être dans son plein, la brise et la fraîcheur de la mer le tempèrent. Tout en nageant sur le dos, on voit la côte, les sables, les tamaris qui frémissent, les bois de pins qui se chauffent et répandent des senteurs ; on sent les vagues bleues qui arrivent, qui viennent vous bercer ; on regarde la frange d’argent mobile dont elles entourent la côte, on y sent le perçant regard, la force virile, la sérénité joyeuse du magnifique soleil. Comme il triomphe là-haut ! Comme il lance à pleines poignées toutes ses flèches sur cette nappe immense ! Comme ces flots miroitent, étincellent et tressaillent sous cette pluie de flammes ! On pense aux Néréides, à Apollon. Que la Galatée de Raphaël est vraie, comme on entend les conques sonnantes des Tritons, et que des cheveux blonds dénoués, des corps blancs lavés d’écume, seraient beaux sur cet azur !

Nous sommes entrés dans une auberge et nous sommes restés une heure accoudés sur la