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L’ÉCOLE


tration de l’autorité et à la centralisation des services, à l’uniformité et à l’encadrement, à l’égalité dans l’obéissance, au concours, à l’entraînement, bref à l’esprit du règne, aux combinaisons de la pensée compréhensive et calculatrice qui, revendiquant pour soi et s’adjugeant en propre tout le champ de l’action humaine, y plante partout ses poteaux, ses barrières, ses compartiments rectilignes, dresse et dispose des lices, convoque et introduit les coureurs, les pousse en avant, les stimule à chaque stade, réduit leur âme à la volonté fixe d’avancer vite et loin, et ne laisse à l’individu de motif pour vivre que l’envie de figurer aux premiers rangs dans la carrière où, tantôt par choix, tantôt par force, il se trouve inclus et lancé.

À cet effet, deux sentiments sont requis chez les adultes et partant chez les enfants : le premier est l’acceptation passive d’une règle imposée, et nulle part autant que sous le régime universitaire la règle, appliquée d’en haut, n’enserre et ne dirige la vie totale par

    de la pension : 900 francs, insuffisance de la nourriture et de l’habillement, cours et dortoirs encombrés, trop d’élèves dans chaque classe, profits du proviseur qui mange très bien, donne chaque semaine un dîner brillant à trente personnes, prélève sur le dortoir, déjà trop étroit, une salle de billard, s’approprie une terrasse plantée de beaux arbres. Le censeur, l’économe, l’aumônier, le sous-directeur font de même, quoique un peu moins. Les maîtres d’étude sont aussi mal nourris que les élèves. Punitions dures, nulle remontrance ou direction paternelle, maîtres d’étude rossés quand ils veulent appliquer la règle, méprisés des supérieurs et sans influence sur les élèves. « Le libertinage, la paresse, l’intérêt animaient tous les cœurs ; aucun lien d’amitié n’unissait les maîtres aux élèves, ni les élèves entre eux. »


  le régime moderne, III.
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