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L’ESPRIT ET LA DOCTRINE


d’autres espèces détruites ou survivantes, a pu l’habiter. — Sur cette science de la matière brute, on voit en même temps s’élever la science de la matière organisée. Grew, puis Vaillant viennent de démontrer les sexes et de décrire la fécondation des plantes ; Linné invente la nomenclature botanique et les premières classifications complètes ; les Jussieu découvrent la subordination des caractères et la classification naturelle. La digestion est expliquée par Réaumur et Spallanzani, la respiration par Lavoisier ; Prochaska constate le mécanisme des actions réflexes ; Haller et Spallanzani expérimentent et décrivent les conditions et les phases de la génération. On pénètre dans le bas-fond du règne animal ; Réaumur publie ses admirables mémoires sur les insectes, et Lyonnet emploie vingt ans à figurer la chenille du saule ; Spallanzani ressuscite ses rotifères, Trembley découpe son polype d’eau douce, Needham fait apparaître ses infusoires. De toutes ces recherches se dégage la conception expérimentale de la vie. Déjà Buffon et surtout Lamarck, dans leurs ébauches grandioses et incomplètes, esquissent avec une divination pénétrante les principaux traits de la physiologie et de la zoologie modernes. Des molécules organiques partout répandues ou partout naissantes, des sortes de globules en voie de déperdition et de réparation perpétuelles, qui, par un développement aveugle et spontané, se transforment, se multiplient, s’associent, et qui, sans direction étrangère, sans but préconçu, par le seul effet de leur structure et de leurs alentours, s’ordonnent pour composer ces édi-


  anc. rég. i.
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