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LE RÉGIME MODERNE


retard, et le Trésor ne recevait chaque année que les trois cinquièmes de l’année courante[1] ; à partir de 1800, l’impôt direct rentre presque en entier avant le dernier jour de l’année courante, et, un demi-siècle plus tard, les contribuables, au lieu d’être en retard, seront en avance[2]. Pour faire la besogne, avant 1789 il fallait, outre le personnel administratif, environ 200 000 collecteurs[3], occupés, deux ans de suite et pendant la moitié de leur journée, à courir de porte en porte, misérables et haïs, ruinés par leur office ruineux, écorchés, écorcheurs, toujours escortés d’huissiers ou de garnisaires ; depuis 1800, cinq ou six mille percepteurs et autres agents du fisc, honorables, honorés, n’ont besoin que de faire à domicile leur travail de bureau et aux jours dits leur tournée régulière, pour percevoir, sans vexations et avec très peu de contrainte, une somme plus que double. Avant 1789, l’impôt direct rapportait environ 170 millions[4] ; à partir de l’an XI, il en rapporte

    été achevés ; ceux de l’an VIII ont été faits aussi promptement qu’on pouvait l’espérer, et ceux de l’an IX ont été préparés avec une célérité telle, que, pour la première fois depuis la Révolution, le recouvrement a pu commencer avec l’année même à laquelle ils appartenaient. »

  1. Archives parlementaires, VIII, 11 (Rapport de Necker aux États généraux, 5 mai 1789) : « Ces deux cinquièmes, quoique légitimement dus au roi, sont toujours en arrière… (Aujourd’hui) tous ces arriérés se montent à environ 80 millions. »
  2. M. de Foville, la France économique, 354.
  3. L’Ancien Régime, tome II, 240.
  4. Necker, De l’administration des finances, I, 104, et Rapport aux États généraux, 5 mai 1789. On arrive au chiffre de 170 millions en combinant ces deux documents, et en remarquant que le 3e vingtième est supprimé en 1789.)