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L’ÉGLISE


tion s’est arrêtée ; le dogme était achevé, définitif et complet ; il n’y avait plus qu’à le maintenir. — Au contraire, chez les catholiques, après comme avant cette date, le dogme n’a jamais cessé de se développer, de se préciser, et la révélation continue ; les treize derniers conciles étaient inspirés comme les sept premiers, et le premier, où figura saint Pierre à Jérusalem, n’avait pas d’autres prérogatives que le dernier, convoqué par Pie IX au Vatican. L’Église n’est pas « un cadavre gelé[1] », mais un corps vivant, conduit par une tête toujours agissante, et qui poursuit son œuvre, non seulement en ce monde, mais aussi dans l’autre, d’abord pour le définir, ensuite pour le décrire et y assigner des places ; hier encore, elle ajoutait au dogme deux articles de foi, l’immaculée conception de la Vierge et l’infaillibilité du pape ; elle conférait des titres ultra-terrestres, elle déclarait saint Joseph patron de l’Église universelle, elle canonisait saint Labre, et élevait saint François de Sales à la dignité de docteur. Mais elle est conservatrice autant qu’active ; de tout son passé, elle ne rétracte rien ; elle ne rapporte aucun de ses anciens décrets ; seulement, avec des explications, des commentaires et des déductions de juriste, elle relie ces anneaux entre eux, elle en forme une chaîne ininterrompue, depuis l’époque présente jusqu’à l’Évangile, et au delà à travers l’Ancien Testament, jusqu’aux origines du monde, de façon à coordonner autour d’elle-même toute l’histoire et tout l’univers. Révélations et prescriptions, la

  1. Mot de Joseph de Maistre sur les Églises du rite grec.