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L’ÉGLISE


elle y règne et gouverne. Sur les âmes et intelligences, très nombreuses, qui, par naturel ou par éducation, sont disciplinables, qui répugnent à l’initiative personnelle, qui ont besoin d’une direction impérative et systématique, le prestige d’un pareil gouvernement est souverain, égal ou supérieur à celui que l’ancien État romain exerçait sur ses 120 millions de sujets. Hors de l’Empire, tout leur semblait anarchie ou barbarie ; même impression chez les catholiques à l’endroit de leur Église. Spirituelle ou temporelle, une autorité a bien des chances pour être adoptée et révérée, lorsque, toujours visible et partout présente, elle n’est ni arbitraire ni capricieuse, mais réglée, contenue par des textes, une tradition, une législation et une jurisprudence dérivée d’en haut et d’une source plus qu’humaine, consacrée par l’antiquité, la continuité, la cohérence et la grandeur de son œuvre, bref par ce caractère que la langue latine est seule capable d’exprimer, et qu’elle nomme la majesté.

Parmi les actes que l’autorité religieuse prescrit à ses sujets, il en est qu’elle impose en son propre nom, rites, pratiques extérieures et autres observances, dont les principales, dans le catéchisme catholique, font suite aux « commandements de Dieu » et sont intitulées les commandements de l’Église ». — Chez les protestants, où l’autorité de l’Église a presque péri, les rites ont presque disparu ; pris en eux-mêmes, ils n’ont plus été considérés comme obligatoires ou méritoires ; les plus importants, l’Eucharistie elle-même, n’ont été con-