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L’ESPRIT ET LA DOCTRINE


ne devra porter une charge dont un autre serait exempt. — D’autre part, tous étant libres, chacun entre avec sa volonté propre dans le faisceau de volontés qui constitue la société nouvelle ; il faut que, dans les résolutions communes, il intervienne pour sa part. Il ne s’est engagé qu’à cette condition ; il n’est tenu de respecter les lois que parce qu’il a contribué à les faire, et d’obéir aux magistrats que parce qu’il a contribué à les élire. Au fond de toute autorité légitime, on doit retrouver son consentement ou son vote, et, dans le citoyen le plus humble, les plus hauts pouvoirs publics sont obligés de reconnaître un des membres de leur souverain. Nul ne peut aliéner ni perdre cette part de souveraineté ; elle est inséparable de sa personne, et, quand il en délègue l’usage, il en garde la propriété. — Liberté, égalité, souveraineté du peuple, ce sont là les premiers articles du contrat social. On les a déduits rigoureusement d’une définition primordiale ; on déduira d’eux non moins rigoureusement les autres droits du citoyen, les grands traits de la constitution, les principales lois politiques ou civiles, bref l’ordre, la forme et l’esprit de l’État nouveau.

II

De là deux conséquences. — En premier lieu, la société ainsi construite est la seule juste ; car, à l’inverse de toutes les autres, elle n’est pas l’œuvre d’une tradition aveuglément subie, mais d’un contrat conclu entre égaux, examiné en pleine lumière et consenti en pleine

  anc. rég. ii.
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