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LA RÉVOLUTION


braves, qui vont au-devant des balles. Dans un État, ce sont toujours les mêmes, une petite élite de gens probes, qui vont au-devant du percepteur. Il faut une contrainte efficace dans le régiment pour suppléer à la bravoure de ceux qui n’en ont guère, dans l’État pour suppléer à la probité de ceux qui n’en ont pas. — C’est pourquoi, pendant les huit mois qui suivent, du 1er mai 1790 au 1er janvier 1791, la contribution patriotique ne fournit que 11 millions. Deux ans après, le 1er février 1793, sur les quarante mille rôles communaux qui doivent la répartir, il y en a sept mille qui ne sont pas encore faits ; sur 180 millions qu’elle devrait produire, 73 millions sont encore dus. — Or, dans toutes les branches de la recette, la résistance du contribuable produit un déficit semblable et des retards pareils[1]. Au mois de juin 1790, un député déclare à la tribune que, « sur trente-six millions d’impositions qu’on devrait recevoir par mois, on n’en reçoit que neuf[2]. » Au mois de novembre 1791, un rapporteur du budget dit que les recettes, qui devraient monter à quarante ou quarante-huit millions par mois, ne dépassent pas onze millions et demi. Au 1er février 1793, sur les impôts directs de 1789 et 1790, il reste encore dû cent soixante-seize millions. — Visiblement, contre les anciennes taxes, même

  1. Mercure de France, 28 mai 1791 (séance du 22 mai). — Discours de M. d’Allarde : « La Bourgogne n’a encore rien payé de 1790. »
  2. Moniteur, séance du 1er juin 1790. Discours de M. Fréteau. — Mercure de France, 26 novembre 1791. Rapport de Laffon-de Ladébat.