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LE GOUVERNEMENT RÉVOLUTIONNAIRE


de Vergniaud pourraient tout déranger au dernier moment ; c’est pourquoi un décret subit permet au tribunal de clore les débats, quand les jurés se trouveront suffisamment éclairés. Ceux-ci le sont dès la septième audience, et l’arrêt de mort tombe à l’improviste sur les accusés, qui n’ont pu se défendre. L’un d’eux, Valazé, se poignarde, séance tenante, et le lendemain, en trente-huit minutes, le couperet national abat les vingt têtes qui restent. — Plus expéditive encore est la procédure contre les accusés qui se sont dérobés au jugement : Gorsas, saisi à Paris le 8 octobre, y est guillotiné le même jour ; Birotteau, saisi à Bordeaux le 24 octobre, monte à l’échafaud dans les vingt-quatre heures. Les autres, traqués comme des loups, errent en nomades, sous des déguisements, de cachette en cachette, et la plupart, arrêtés tour à tour, n’ont que le choix entre divers genres de mort. Chambon est tué en se défendant ; Lidon, après s’être défendu, se fait sauter la cervelle ; Condorcet s’empoisonne dans le corps de garde de Bourg-la-Reine ; Roland se perce de son épée sur une grande route ; Clavière se poignarde dans sa prison ; on trouve Rébecqui noyé dans le port de Marseille, Pétion et Buzot demi-mangés par les loups dans une lande de Saint-Émilion ; Valady est exécuté à Périgueux, Dechézeau à Rochefort, Grangeneuve, Guadet, Salle et Barbaroux à Bordeaux, Coustard, Cussy, Rabaut-Saint-Étienne, Bernard, Masuyer et Lebrun à Paris. Ceux-là mêmes qui ont donné leur démission depuis le mois de janvier 1793, Kersaint et Manuel, payent de leur vie le crime d’avoir