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LA RÉVOLUTION


siégé au côté droit, et, bien entendu, Mme Roland, qui passe pour le chef du parti, est guillotinée l’une des premières[1]. — Des cent quatre-vingts Girondins qui conduisaient la Convention, cent quarante ont péri, ou sont en prison, ou ont fui sous un arrêt de mort. Après un tel retranchement et un pareil exemple, le demeurant des députés ne peut manquer d’être docile[2] ; ni dans les pouvoirs locaux, ni dans le pouvoir central, la Montagne ne rencontrera de résistance ; son despotisme est établi dans la pratique : il ne lui reste plus qu’à le proclamer dans la loi.

XI

Dès le 24 août, sur la motion de Basire, la Convention a décrété « que la France est en révolution jusqu’à ce

  1. Louvet, Mémoires, 321 (Liste des Girondins qui ont péri ou qui ont été emprisonnés ; 24 fugitifs ont survécu).
  2. La terreur et le dégoût de la majorité survivante se manifestent par le petit nombre des votants, et son abstention est d’autant plus significative qu’il s’agit de nommer des dictateurs. — (Mortimer-Ternaux, VIII, 395, 416, 435.) Les membres du Comité de Salut public, élu le 10 juillet, ne réunissent que de 100 à 192 voix ; les membres du Comité de Sûreté générale, élu le 16 juin, ne réunissent que de 22 à 113 voix ; les membres du même comité, renouvelé le 11 septembre, ne réunissent que de 52 à 108 voix ; les juges du Tribunal révolutionnaire, complété le 3 août, ne réunissent que de 47 à 65 voix. — Meillan, 85 (à propos de la première institution du gouvernement révolutionnaire, sur la motion de Basire, 28 août) : « 60 ou 80 députés rendirent ce décret ; il avait été précédé d’un autre, rendu à la pluralité de 30 contre 10… Pendant deux mois, la plus nombreuse séance ne contint pas 100 députés actifs. Les Montagnards parcouraient les départements, pour tromper ou intimider le peuple ; les autres, découragés, s’abstenaient des séances, ou se dispensaient de prendre part aux délibérations. »