Page:Taine - Les Origines de la France contemporaine, t. 8, 1904.djvu/254

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
250
LA RÉVOLUTION


simples du gouvernement révolutionnaire, et voilà son invention propre, pareille à celle du sauvage qui abat l’arbre pour avoir le fruit. — Car, après la première application du maximum, le boutiquier ne peut plus continuer son commerce ; attirés par le bas prix soudain et forcé, les chalands en foule ont vidé sa boutique dès les premiers jours[1] ; ayant vendu ses marchandises pour la

    manne pour cinquante-quatre sous, Hecht, propriétaire, est condamné à une amende de 15000 livres ; Madeleine Meyer, à Rosheim, marchande en détail, accusée d’avoir vendu une chandelle dix sous, est condamnée à 1000 livres d’amende et tenue de les payer en trois jours ; Braun, boucher et cabaretier, accusé d’avoir vendu une chopine de vin vingt sous, est condamné à une amende de 40000 francs, à l’emprisonnement jusqu’à payement de ladite somme, et à être exposé au poteau devant son domicile, pendant quatre heures, avec cet écriteau : avilisseur de la monnaie nationale. » — Recueil de pièces authentiques servant à l’histoire de la Révolution à Strasbourg (Supplément, 21, 30, 64) : « Marie-Ursule Schnellin et Marie Schutzmann, servante, accusées d’avoir accaparé du lait, la première condamnée au poteau pendant la journée, avec la note accapareuse de lait, tenant d’une main l’argent, et de l’autre le pot au lait ; la deuxième, servante chez le citoyen Trenner, lui, Trenner, condamné à une amende de 300 livres, payable en trois jours. — Dorothée Franz, convaincue d’avoir vendu deux têtes de salade vingt sous, et d’avoir avili par là la valeur des assignats, condamnée à l’amende de 3000 livres, à être renfermée pendant six mois, et exposée au poteau pendant deux heures. » — Ib., I, 18 : « Un épicier, accusé d’avoir vendu du sucre candi au-dessus de la taxe, bien qu’il n’y fût pas compris, fut condamné à 100000 livres d’amende et à la détention jusqu’à la paix. » — Arrêté de Saint-Just et Lebas, 3 nivôse an II : — « Il est ordonné au Tribunal criminel du département du Bas-Rhin de faire raser la maison de quiconque sera convaincu d’agiotage, ou d’avoir vendu au-dessus du prix fixé par le maximum. » En conséquence, le 7 nivôse, la maison de Schauer, pelletier, est rasée.

  1. Archives des affaires étrangères, tome 322 (Lettre de Haupt, Belfort, 3 brumaire an II) : « À mon arrivée ici, j’ai trouvé la loi