Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/157

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cru qu’il ne disoit tout cela que pour obliger ses enfants à lui en offrir vite une Huguenotte. Enfin on lui proposa la veuve d’un gentilhomme hollandais, nommé Langherac, qui avoit été ambassadeur en France. Cette femme étoit pourtant Françoise et sœur du marquis de Gallerande, de la maison de Clermont d’Amboise. Mais le propre jour qu’il signa les articles, il alla trouver auparavant madame la maréchale de Châtillon pour lui offrir, mais en vain, la préférence. Cette madame de Langherac étoit hors d’âge d’avoir des enfants. On admiroit sa destinée pour le tabouret. Elle l’avait eu comme étrangère en son pays, et maintenant elle le recouvre en épousant un homme de quatre-vingt-dix ans, qui est un âge où l’on songe rarement à se remarier. Il faut aussi admirer la destinée du bon homme à être cocu au moins une fois en sa vie. Il l’écrivit à madame de La Forest, mais il y a toutes les apparences du monde que Cumont, le conseiller, homme d’esprit, qui de tous temps étoit le galant de madame de Langherac, n’aura pas perdu une si belle occasion de coucher avec une duchesse. C’est ce même M. de Cumont qui étoit si avare qu’il est mort dans son pourpoint, faute d’une chemisette.

On dit que le bon homme, le jour de ses noces, fit demeurer ses gens dans sa chambre, pour être témoins comme il avoit consommé le mariage. On ajoute qu’il les fit aussi appeler le lendemain matin. Cette troisième femme ne dura guère plus d’un an. De regret, le maréchal quitta La Force, et se retira à une autre maison qu’on appelle Mucidan, pour y faire le beau ténébreux[1].

  1. Allusion à Dom Quichotte de la Manche.