Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/27

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Henri IV, comme l’autre à Henri III, et le suivit dans toutes ses adversités. Lui et M. d’Épernon ont toujours été fort bien ensemble, et on disoit à Bordeaux : « M. de Roquelaure et M. d’Épernon, qui toque l’un toque l’autre. »

On dit qu’ayant fait sommer je ne sais quelle ville, on lui vint dire qu’ils ne se vouloient pas rendre : « Eh bien, répondit-il, que s’en esten, » c’est-à-dire, qu’ils s’en abstiennent ; mais cela n’a point de grâce comme en gascon ; c’est plutôt : « Eh bien, qu’ils ne se rendent donc pas. »

Il disoit que tous les courtisans étoient des traîtres, et quand il entroit dans l’antichambre du Roi : « Oh ! s’écrioit-il, que voici de gens de bien ! »

Quand le connétable de Castille vint à Paris, Henri IV le fit traiter, et le connétable de France étoit vis-à-vis de lui ; chaque Espagnol avoit ainsi un François de l’autre côté de la table. Le nonce du pape, qui fut depuis le pape Urbain, étoit au haut bout. Un Espagnol, qui étoit vis-à-vis du maréchal de Roquelaure, faisoit de gros rots en disant : « La sanita del cuerpo, señor mareschal. » Le maréchal s’ennuya de cela, et tout d’un coup, comme l’autre réitéroit, il tourna le c.., et fit un gros pet, en disant : « La sanita del culo, señor Espagnol. » Il étoit assez sujet aux vents. Un jour il fut obligé de sortir en grande hâte du cabinet de Marie de Médicis ; mais il ne put si bien faire qu’elle n’entendît le bruit. Elle lui cria : « Lho sentito, segnor mareschal. » Lui, qui ne savoit pas l’italien, lui répondit sans se déferrer : « Votre Majesté a donc bon nez, madame ? »