Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/303

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Brinon-l’Archevêque, château dépendant de l’archevêque de Sens. Un jour il envoya ses gens pour acheter au marché de Brinon des œufs et du beurre. Le marché n’étoit point encore ouvert ; on leur dit qu’ils attendissent. Ces gens vont rapporter à Maulny qu’on a refusé de leur vendre, etc. Je crois qu’il y avoit déjà eu quelque petite chose entre l’archevêque et lui, peut-être un peu de jalousie, car l’archevêque est galant. Quoi qu’il en soit, Maulny, lui huitième, va à Brinon, n’y trouve point l’archevêque, qui étoit allé à une paroisse là auprès, appelée Saint-Florentin, tenir son synode. Il rencontre un fermier à la petite porte du château qu’il maltraite. Un Suisse vient, et un autre homme ; il donne un coup d’épée à l’un au travers du corps, et un coup de pistolet à l’autre : je pense qu’ils en sont morts. L’abbé de Nesmond, à ce qu’on m’a dit, y survint ; il étoit là pour ce synode ; il lui voulut faire quelque remontrance. Maulny le maltraite de paroles. L’abbé ne s’effarouche point de cela, et lui persuade de s’en retourner et d’écrire à M. de Sens. Maulny écrit ; mais à peine la lettre est-elle partie, qu’il monte à cheval et va faire mille insolences à l’archevêque tenant son synode. On dit qu’il lui proposa de se battre en lui disant : « Vous êtes gentilhomme et d’une race assez vaillante. » On se mit entre eux. Voilà tous les Montespan, tous les Bellegarde, tous les Terme, tous les Gondrin, tous les d’Antin à cheval, et le maréchal d’Albret, leur parent, aussi. L’autre assemble ses amis de son côté, mais en petit nombre. Enfin on l’obligea, prenant la chose du côté de la conscience, à venir dans la cathédrale de Sens sur un échafaud, sans manteau, chapeau,