Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 1.djvu/327

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



GENS GUÉRIS OU SAUVÉS
PAR MOYENS EXTRAORDINAIRES.


Feu M. le prince de Condé, passant à Saint-Pierre-le-Moutier, près Nevers, comme le prévôt alloit faire pendre un homme, le pendart eut assez de jugement pour dire qu’il avoit quelque chose d’importance à découvrir à M. le duc pour le service du Roi. M. le Prince voulut bien l’entendre. On fait retirer tout le monde : « Monseigneur, dit-il à M. le Prince, dites, s’il vous plaît, à Sa Majesté que vous avez trouvé ici un pauvre homme bien empêché. » M. le Prince se mit à sourire, et dit au prévôt : « Monsieur le prévôt, gardez-vous bien de faire exécuter cet homme-là que vous n’ayez de mes nouvelles. » Il en fit le conte au Roi et obtint sa grâce.

Un soldat françois qui étoit au service des États des Provinces-Unies, s’étant trouvé engagé avec quelques autres en je ne sais quel crime, il fut condamné à tirer au billet avec eux à qui seroit pendu ; mais il ne voulut jamais tirer, et l’officier, selon la coutume, fut obligé de tirer pour lui, et tira le billet où il y avoit écrit Potence. Le soldat en appelle, dit qu’il n’avoit point donné ordre à l’officier de tirer pour lui, que ce n’avoit point été de son consentement, et fit tant de bruit que cela vint aux oreilles de feu M. de Coligny,