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tre se souvint de l’avoir vu, et dit à M. de Rohan qui il étoit, et en obtint la grâce. Ce garçon va en conter l’histoire à M. Le Faucheur, qui lui conseilla de se retirer chez son père, de peur du tertia solvet ; ce qu’il fit.




LA PRINCESSE D’ORANGE, LA MÈRE[1].


Elle est de la maison de Solms, une fort bonne maison d’Allemagne. Elle vint en Hollande avec la reine de Bohème, non pas en qualité de fille d’honneur, mais toutefois nourrie à ses dépens. M. d’Hauterive de l’Aubespine[2], frère de feu M. de Châteauneuf, depuis gouverneur de Bréda, se mit à lui en conter[3], et en dit beaucoup de bien au prince Maurice, qui, craignant que son frère ne s’alliât à quelque maison

  1. Émilie de Solms, fille de Jean-Albert, comte de Solms-Brunsfelds, femme de Henri-Frédéric de Nassau, prince d’Orange, mourut en 1675.
  2. François de l’Aubespine, marquis d’Hauterive, gouverneur de Bréda, mourut en 1670.
  3. On fait deux ou trois plaisants contes de ce M. d’Hauterive. Il avoit un cuisinier qui épiçoit toujours trop. Il le menaça long-temps de l’envoyer aux Moluques chercher des épiceries, puisqu’il aimoit tant à épicer. Enfin cet homme ne se corrigeant point pour tout cela, il lui commanda de faire des pâtés et de les porter dans un vaisseau qui alloit aux Indes orientales. Il feignoit que c’étoit un présent qu’il faisoit à quelqu’un de ce navire. Cependant il avoit donné le mot au capitaine de faire boire le cuisinier et de lever pendant ce temps-là les ancres. Ainsi le pauvre cuisinier fit le voyage, et après il faisoit tout trop doux, tant il avoit peur d’y retourner.

    Une fois il avoit un valet à tête frisée qui ne faisoit que coqueter