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siége d’Amiens, il court après madame de Beaufort[1], sans se tourmenter du cardinal d’Autriche, depuis l’archiduc Albert, qui s’approchoit pour tenter le secours de la place[2].

Il n’étoit ni trop libéral, ni trop reconnoissant. Il ne louoit jamais les autres, et se vantoit comme un gascon. En récompense, on n’a jamais vu un prince si humain, ni qui aimât plus son peuple ; il ne refusoit point de veiller pour le bien de son État. Il a fait voir en plusieurs rencontres qu’il avoit l’esprit vif et qu’il entendoit raillerie[3].

Pour reprendre donc ses amours, si Sébastien Zamet, comme quelques-uns l’ont prétendu, donna du poison à madame de Beaufort[4], on peut dire qu’il

  1. Gabrielle d’Estrées. Henri IV avoit érigé pour elle le comté de Beaufort en duché-pairie.
  2. Sigogne* en fit cette épigramme :

    Ce grand Henri, qui souloit estre
    L’effroi de l’Espagnol hautain,
    Fuyt aujourd’huy devant un prestre,
    Et suit le c.. d’une p..... (T.)

     — Mézerai dit que peu après qu’il eut amené Gabrielle au siége de la ville, « il fut contraint d’éloigner ce scandale de la vue des soldats, non-seulement par leurs murmures qui venoient jusqu’à ses oreilles, mais aussi par les reproches du maréchal de Biron. » (Abrégé chronologique de l’Histoire de France, édition de 1682, tome 6, page 170.)

    * Voir sur ce poète une note placée ci-après dans l’Historiette de mademoiselle Du Tillet.

  3. Henri IV étant près de se faire catholique, ses favoris lui disoient : « Sire, avertissez-nous quand vous changerez de religion. » Il faisoit alors l’amour à une religieuse de Passy, il s’en lassa et s’en alla faire autant à Maubuisson ; ils lui dirent : « Vous aviez promis de nous avertir. »
  4. Sébastien Zamet étoit de Lucques ; il fut naturalisé françois. Plaisant et enjoué, il s’étoit fait aimer de Henri IV, qui avoit choisi sa maison