Page:Tallemant des Réaux - Les historiettes, tome 2.djvu/208

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chale de La Châtre, sa sœur, il lui répondit : « Pardieu, il ne faut pas croire tout ce qu’on dit, ou bien il faudroit croire que vous couchez avec votre nièce. » Le Roi fut ravi de cela, et le cardinal en pensa enrager. Ensuite la feue Reine-mère s’étant brouillée avec le cardinal, il prit son parti, et fut capitaine de ses gardes. Mais quand il vit que Fabroni et sa femme, avec le Père Chanteloupe, avoient empaumé la Reine, il se retira et fut fort mal payé de ses pensions et de ses appointements. Je crois qu’il se retira à Malte ; au moins y étoit-il quand le pape Urbain le fit venir pour s’en servir contre le duc de Parme. Voici comment cela arriva. Son neveu, le commandeur de Valençay, étoit ambassadeur de Malte auprès du Pape, les bonnes grâces duquel il sut si bien gagner, que le Saint-Père lui disoit des choses qu’il ne disoit pas à ses propres neveux. Le Pape voyant la guerre de Parme prête à éclater, lui dit un jour : « Donnez-moi un capitaine. — Saint-Père, répondit-il, je ne puis vous donner que mon oncle, le bailli de Valençay, qui est à Malte. — Quoi, celui, reprit le Pape, qui commandoit les vaisseaux à La Rochelle ? — Celui-là même. — Faites-le venir. » Le commandeur le mande ; il vient, mais il ne savoit pourquoi on le faisoit venir. Le commandeur, sans lui rien dire, le loge, lui donne un bel appartement bien meublé, un carrosse, trois estafiers, et de l’argent pour jouer. Le Pape fournissoit à tout cela. Le bailli, étonné de ces régales, disoit : « J’ai un fou de neveu qui n’est qu’un gueux aussi bien que moi, et il ne me laisse manquer de rien. Hé, lui disoit-il, où prends-tu tout cela ? — Ne vous en tourmentez pas, répondoit le neveu, réjouissez-vous seulement. » Au bout de six mois, on le